« Ardennes Mystérieuses, Insolites et Sacrées » (103/140) : SAINTE-ODE (Belgique) : Nature, terroir et traditions

Endroits et histoires magiques : cette série se poursuit sur mon bloc spécifique dévolue à « Ardennes Mystérieuses, Insolites et Sacrées » ! En voici un nouvel exemple…

 1.jpgAujourd’hui, l’heure est venue d’emboîter le pas d’auteurs « locaux », de rassembler ce qui était épars, de (re)donner aux Ardennes leurs lettres de noblesse, de consulter à nouveau les pages des légendes et des traditions typiques de ces contrées merveilleuses afin de préparer au mieux des promenades et des séjours sur place. Et, surtout, d’y goûter ! (*)

 Quatre sites sont recommandés par le Tourisme local : Champimont, le centre d’interprétation du champignon, l’église romane d’Amberloup, le site des éoliennes et la Chapelle de la Bonne Dame.

 

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Le champignon à Champimont…

 

À ce sujet, voici une légende qui traverse les décennies :

 « Au VIIe siècle, il existe une communauté de vierges installée dans la forêt de Freyr s’étendant de la Barrière de Champlon vers Saint-Hubert, Mochamps… On y trouve des hêtres, chênes, aulnes, des landes sèches et humides, de la tourbe, des cigognes noires, des chouettes, pics noirs, libellules, papillons…

Tous les jours, à la tombée de la nuit, une cloche retentit afin de permettre aux gens égarés de rejoindre la demeure communautaire et y recevoir l’hospitalité. Comme à la Baraque Michel (voir ce chapitre), comme à la Dômerie d’Aubrac (« Cloche des Perdus »)…

Hélas, durant une nuit hivernale, des bandits envahissent le refuge. C’est une véritable nuit d’horreur dont, seule, Ode échappe.

Depuis lors, elle vit en ermite dans la forêt, non loin de Lavacherie où elle se rend parfois pour quémander un peu d’aide.

Un jour, un nouvel arrivé au village, la rabroue. Le soir-même, cet homme tombe totalement aveugle. Il se remémore son attitude à l’égard d’Ode, fait le lien avec son mal et, plein de regrets, s’en va aider la jeune femme.

Aussitôt, elle fait jaillir une source d’eau et dit au villageois : « Tu peux te laver les yeux avec cette eau ! » L’homme retrouve la vue. »

 

La source existe toujours et l’eau est recueillie dans une cuvette en forme de coquillage. Un sanctuaire rend hommage à la Bonne Dame et l’endroit est l’objet d’une certaine dévotion. Il se dit qu’Ode, devenue sainte, était la tante de saint Hubert, mais ce serait davantage une légende qu’un fait historique.

 

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L’Ourthe à Sainte-Ode.

Concernant le patrimoine religieux, il est aussi recommandé :

 

– Le Domaine de Beauplateau : ancien couvent (1880) détruit partiellement et qui est devenu un Centre d’activité sociale et touristique.

– Le vitrail de l’église de Houmont : réalisé en 1945, il représente l’emblème de la 17e Division Airborne ayant combattu dans la région en décembre 1944 et décembre 1945 lors de la Bataille des Ardennes. C’est le point de départ de la Route du Souvenir de Sainte-Ode (55 kilomètres) retraçant les moments forts de cette formation militaire.

 

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                                                                                   Emblème de la 17th Airborne Division.

 

L’église de Lavacherie, ses vitraux, son chemin de croix, et une première chapelle (1692) dédiée à Saint-Aubin et à Saint-Antoine de Padoue.

– L’église de Tillet : dédiée à saint Ouen (VIIe siècle), évêque de Rouen, familier de Dagobert et conseiller de la reine Bathilde.

 

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La jonquille, emblème de Sainte-Ode.

 

 

(*) Au fil des jours, vous pourrez me suivre dans quelque 140 lieux légendaires ou historiques français, belges, luxembourgeois et allemands, repris de mon ouvrage et de mes émissions « Ardennes Mystérieuses, Insolites et Sacrées » (Éditions Jourdan, RTBF, TV5 Monde, Fréquence Terre-Radio France Internationale) sur le blog spécifique : 

http://ardennesmysterieusesinsolitesetsacrees.skynetblogs.be/

 

Et, chaque semaine, en radio avec une soixantaine de sites ardennais français dans l’émission « Nature sans Frontières » sur « Fréquence Terre-RFI » : http://www.frequenceterre.com/

 

 

 

 

 

Verlaine emprisonné

Rethel1.JPGHier soir, lors de la remarquable « Grande Librairie » (France 5), il fut question de « grands auteurs classiques ». L’occasion, pour moi, d’évoquer Verlaine dans une rubrique de ma série « Ardennes Mystérieuses » (Fréquence Terre, Éditions Jourdan) sous le titre : « Verlaine entre sublime et sordide » :http://ardennesmysterieusesinsolitesetsacrees.skynetblogs.be/archive/2016/05/27/ardennes-mysterieuses-insolites-et-sacrees-97-140-rethel-fr-8611784.html

Photo : Devant la porte d’une cellule de l’époque de Verlaine emprisonné.

Dossier « Fréquence Terre » : Mourir, puis donner la vie

PGFFT et ED.jpgIl n’est jamais trop tard, tant qu’on est conscient, de formuler officiellement ses dernières volontés en vue de son inévitable décès et de la destination de ses restes. Une fois n’est pas coutume, afin d’illustrer de manière concrète la présente rubrique, je vais vous entretenir de mes démarches en ce sens et démontrer qu’il n’est pas toujours aisé de faire admettre son choix, surtout dans la toute dernière étape de sa mort.

 

Ainsi, de manière officielle tant auprès de mes proches, que des services communaux, de mon médecin traitant, d’un laboratoire d’anatomie universitaire, de la Fondation Métamorphose[1] (dont il sera question ci-après, justement, dans la difficulté de dernière étape)…, j’ai fourni les documents en bonne et due forme afin de signifier, dans l’ordre : mon refus d’acharnement thérapeutique, mon souhait d’euthanasie selon la loi belge dont je dépends (mais pas encore en vigueur en France), du don de mon corps à la science et, au terme de tout ceci, de l’humusation[2].

 

Humusation ? Si tout un chacun connaît les termes inhumation, crémation, dispersion des cendres, columbarium…, celui d’humusation est  inconnu de la quasi-totalité de la population. J’en ai fait l’expérience auprès de médecins et d’autorités, pas du tout au courant de la signification de ce terme.

Alors, grâce à l’aimable autorisation des animateurs de la Fondation Métamorphose, plutôt que de longs discours, voici un questions-réponses pour éclairer notre lanterne… même celle des morts, si je puis me permettre cette petite diversion dans un sujet aussi sérieux. Bien que…

En effet, une lanterne des morts est une tour maçonnée comportant des ouvertures vers son sommet où, au crépuscule, l’on hissait une lampe allumée supposée servir de guide aux défunts. Celle que j’ai vue à Sarlat, dans le Périgord, date du XIIe siècle et est classée comme monument historique. Et, dans la problématique de l’humusation, croyez-moi, on a bien besoin d’être guidé !

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La lanterne des morts de Sarlat (Photo Père Igor, CC-BY-SA)

 

– Quel est le principe de base qui guide les partisans de l’humusation ?

 – Protéger la terre coûte que coûte. Aujourd’hui, même si on a été écologique toute sa vie, d’office on pollue la terre lorsqu’on la quitte. Car les deux pratiques funéraires autorisées chez nous, c’est-à-dire en Belgique et en France, l’inhumation et la crémation, sont deux procédés extrêmement polluants. Les pratiques d’ensevelissement actuelles abîment la terre. Et beaucoup de personnes l’ignorent. C’est pour cela que nous avons créé la Fondation Métamorphose. Afin de rendre légale une pratique pour une après mort 100% écologique: l’humusation, ou le retour à la Mère Nature. Nous proposons une nouvelle option pour prendre soin de nos défunts dans le plus grand respect des êtres vivants et de la terre. Parce que nous pensons aussi aux générations futures.

  • Parce que nous avons la volonté de rester écologiques après notre passage sur terre.
  • Parce que les cycles de la nature nous montrent comment renaître.
  • Parce que nos corps sont un potentiel de vie et de fertilité extraordinaires.

– Vous évoquez un enjeu crucial, quel est-il ?

L’enjeu climatique est crucial pour l’avenir de l’humanité tout entière, on le sait. Si nous n’agissons pas, la terre va devenir une planète morte. Suicidaire pour l’avenir des êtres humains mais aussi catastrophique pour la vie sur la Terre. Il est fondamental pour évoluer et survivre à la crise en tous sens qui agite notre planète, de changer notre façon d’agir et de voir le monde. Et la vie et sa fin en font partie.

– Comment, selon la « Fondation Métamorphose » ?

– Au-delà de la vision habituelle de l’écologie qui vise à réduire l’impact de notre empreinte négative sur l’environnement. Dans l’esprit C2C, ce qui signifie « du berceau au berceau », en augmentant notre empreinte positive sur l’environnement, pas seulement en termes d’écologie, mais du point de vue sociétal en entier. Au rythme actuel d’émissions de gaz à effet de serre, le dérèglement climatique est susceptible de provoquer le déclin de l’humanité, d’ici quelques décennies. La protection de l’environnement demeure la meilleure arme pour lutter contre les gaz à effet de serre, pour protéger la biodiversité, et améliorer la qualité des sols et des océans. Réduire son empreinte écologique, c’est ce que permet, entre-autres, cette nouvelle pratique funéraire, l’humusation, basée sur la permaculture. Pour un départ vers une nouvelle vie.

– Votre analyse de la situation écologique de la planète est juste et, depuis une douzaine d’années, « Fréquence Terre » et ses radios partenaires, soit un potentiel de quelque 500 000 auditeurs, œuvrent pour informer et conscientiser au maximum les citoyens face à ce défi planétaire. Ceci étant précisé, venons-en à l’humusation et à votre projet de Jardin-Forêt.

La pratique de l’humusation comprend aussi un espace de mémoire et de recueillement, appelé le Jardin-Forêt, dans lequel les amis et la famille du défunt pourront le saluer, selon le rite qui leur conviendra. Le Jardin-Forêt c’est le lieu ou le défunt va reposer, un lieu de recueillement  fleuri et boisé. Le jour de la cérémonie, un hommage pourra lieu être rendu là, en présence de sa famille et de ses amis et connaissances.

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Un retour à la nature comme ultime volonté.

– Vous évoquez la pratique de l’humusation, concrètement en quoi cela consiste-t-il ?

Le corps du défunt sera placé au milieu d’un compost d’environ 3 m³  dans lequel il sera transformé en humus sain et vivant. Selon les croyances et traditions du défunt et de sa famille, une croix ou une stèle en bois sera implantée pendant cette phase capitale de transformation. Bien entendu, ce seront des fleurs naturelles, que l’on trouvera lors des cérémonies, et au Jardin-Forêt,  pas des fleurs en plastique ou couvertes de pesticides ou d’insecticides. La permaculture permet tout cela très facilement, avec une profusion de fleurs été comme hiver. Il s’agit d’un processus contrôlé de transformation des corps par les micro-organismes dans un compost composé de broyats de bois d’élagage, qui transforme, en 12 mois, les dépouilles mortelles en Humus sain et fertile.  La transformation se fera hors sol, le corps étant déposé dans un compost et recouvert d’une couche de matières végétales broyées que les Humusateurs ajusteront pour en faire une sorte de « monument vivant« .  En une année, l’humusation du défunt, réalisée sur un terrain réservé et sécurisé qui aura pour nom “Jardin-Forêt de la Métamorphose”, produira +/- 1,5 m³ de « super-compost ».

– S’il fallait résumer l’humusation, comment l’évoqueriez-vous ?

– L’humusation, contrairement à l’enterrement ne nécessite:

  • Pas de cercueil.
  • Pas de frais de concession dans un cimetière pendant 5, 10, ou 25 ans.
  • Pas de frais de pierre tombale, ni de caveau.
  • Pas de frais d’embaumement, ni l’ajout de produits chimiques nocifs.
  • Pas de charge d’entretien régulier de la tombe pour les proches.
  • Et ne provoque pas de pollution des nappes phréatiques par la cadavérine, la putrescine, les résidus de médicaments, les pesticides, les perturbateurs endocriniens….

L’humusation, contrairement à l’incinération ne génère:

  • Pas de rejets toxiques dans l’atmosphère, ni dans les égouts.   
  • Pas de consommation déraisonnée d’énergie fossile (+/- 200 l d’équivalent mazout/personne).
  • Pas de location de columbarium.
  • Pas de détérioration des couches fertiles du sol lors la dispersion des cendres.

Au contraire, l’humusation crée un humus riche, utilisable pour améliorer les terres. Un processus de remise à la terre doux, respectueux de la personne et durable.

Un geste écologique extraordinaire après sa mort : participer à l’éclosion de la nature (Photo : Fondation Métamorphose)

– Hélas, trois fois hélas, il y a un problème majeur !

– L’obstacle à lever, c’est la loi. Sans  modification de la loi, seules l’inhumation et l’incinération sont autorisées.

– Il faudrait, donc, une mobilisation citoyenne pour faire modifier cette loi et la « Fondation Métamorphose » s’y emploie. Ça, c’est pour la Belgique. Et en France ? La problématique est la même, selon Alexandre Vella, dans un article paru il y a quelques mois sous le titre « Comment mourir en France sans pourrir la planète »[3] : « Les deux seules pratiques autorisées en France à ce jour sont l’inhumation et la crémation. »

Et de préciser que l’Association Française d’Information Funéraire (AFIF) a calculé qu’une crémation rejette environ 160 kg de gaz à effet de serre, 39 kg pour une inhumation, mais qu’au bout d’une cinquantaine d’années ce chiffre passe à 170 kg. Une autre catastrophe écologique, est le nombre important de problèmes de santé relevés aux abords des 150 crématoriums français.

Donc, la décision en faveur d’une législation de l’humusation est entre les mains des politiques.

Pour ma part, j’ai reçu des autorités communales de mon domicile la réponse suivante : « La problématique que vous soulevez relève d’une compétence régionale. » Et de spécifier qu’il avait été demandé au chef du département de la Population-État civil de tenter, j’ai bien dit tenter, de prendre des renseignements auprès de l’Association des Villes et Communes de la Région de Bruxelles-Capitale.

Il va de soi que, si ma lanterne devait être éclairée en ce domaine, les auditeurs de « Fréquence Terre » et de nos radios partenaires seraient mis au courant. C’est le cas de le dire.

Néanmoins, il faut qu’ils sachent qu’il y a dix-neuf maires pour Bruxelles et une soixantaine de ministres et de secrétaires d’État fédéraux, régionaux, communautaire en Belgique, ce qui laisse deviner des décisions s’apparentant à ce que l’on nomme souvent un « train de sénateur ». Quant à la France, toujours en rade au niveau de la législation sur l’euthanasie, par exemple, je pense que, vue depuis Bruxelles, le monde politique de l’Hexagone est surtout braqué sur les élections présidentielles de l’an prochain.

Mais, grâce à l’inlassable travail d’organisations prônant l’humusation et à diverses pétitions, restons optimistes. Ne dit-on pas que « tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir » ?

 

 

[1] Fondation Métamorphose : metamorphoseproject.wordpress.com et sur Facebook.

[2] http://www.humusation.org

[3] http://www.vice.com

Exclusif : L’énigmatique Ordre de l’Opus Dei

PGFFT et ED.jpg« Littérature sans Frontières » est une chronique de Pierre Guelff (le dimanche 22 mai 2016, à 9 h – audio et article et photos, puis podcast, pour le présent reportage) .

Naguère, j’ai investigué à Paris et dans la cité universitaire belge de Louvain-la-Neuve pour un reportage consacré à l’Opus Dei, institution catholique fondée en 1928 par Josemaria Escriva de Balaguer et principalement composée de laïcs, ordre aussi appelé « Œuvre de Dieu » ou « L’Œuvre ».

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                                                                                 Siège d’une association satellite de l’Opus Dei à Paris.

Dans la Ville Lumière, il était question d’une Association de Culture universitaire et technique, satellite de ladite Œuvre, située boulevard Saint-Germain (photo ci-contre), en Belgique, d’une « élite » estudiantine triée sur le volet.

À l’époque, des rumeurs particulièrement négatives jetaient un certain scepticisme quant au fonctionnement démocratique de cet Ordre : image sulfureuse contre discrétion, sacrifices corporels contre discipline, financements occultes contre dons… Alors, infos ou intox ?

L’implantation de deux résidences (Bauloy pour les garçons et Neussart pour les filles) faisant partie de l’EUCA, association européenne de collèges universitaires, fonctionnant sous, je cite, « l’orientation chrétienne assumée par la prélature de l’Opus Dei » à Louvain-la-Neuve, était sujette à divers conflits. En France, des dizaines d’associations satellites s’implantaient à Paris, Neuilly, Puteaux, Marseille, Aix-en- Provence, Toulouse, Grenoble, Strasbourg, Lyon… et il était parfois question d’une politique « sectaire », alors que d’autres informations faisaient état d’un véritable lobby de l’Opus Dei au sein des institutions européennes à Bruxelles et de la mainmise de l’Œuvre sur la « Table ronde des industriels européens » (ERT), où l’on compta jusqu’à la moitié de ces hauts dirigeants (dont un ancien commissaire européen) membres de l’Opus Dei, disait-on.

Sans avoir la preuve irréfutable que l’Opus Dei pouvait être considérée comme sectaire, un certain malaise l’entourait. Certes, il y avait bien quelques témoignages épars, mais la toute puissante Église catholique n’y voyant mal, le temps passa. Jusqu’à ce début 2016.

Un témoignage capital ?

1540-1.jpgEn effet, les Éditions Albin Michel me firent parvenir le témoignage d’une certaine Maria del Carmen Tapia repris sous le titre « Au cœur de l’Opus Dei ». (Photo ci-contre)

Qui est Maria del Carmen Tapia ? Eh bien, il s’agit d’une ancienne adepte de l’Opus Dei. Ancienne, car elle n’en fait plus du tout partie. Ce qui, en somme, est banal. Les démissions, départs volontaires, évictions… d’associations sont monnaie courante et, alors, il arrive que ces ex-membres témoignent de leur désarroi, de leur peine, de leur colère…

Néanmoins, dans le cas de Maria del Carmen Tapia, il ne s’agit pas du tout de banalité : elle eut des responsabilités particulièrement importantes au sein de l’Opus Dei, puisqu’elle fut la directrice du bureau central de la section des femmes et travailla directement sous les ordres du fondateur, Monseigneur Escriva. Elle dit que les preuves qu’elle avance ne sont pas farfelues, car elles sont étayées par des documents officiels et d’autres témoignages dont elle cite les sources. Et puis, je me suis dit que le fait d’être édité par Albin Michel devait être un gage de sérieux, car je vois mal pareille maison d’édition ne pas prendre des renseignements et s’assurer de la crédibilité de ce qui est, vraiment, plus qu’un brûlot.

Ainsi, Maria del Carmen Tapia s’est littéralement enfuie de cette organisation après avoir même été séquestrée à Rome durant plusieurs semaines, assure-t-elle. Elle quitta l’Europe pour les États-Unis et y travailla aux universités d’Harvard et de Santa Barbara, autre garantie présumée de témoignage plausible.

Briser l’omerta

Bien sûr, je me suis posé une question essentielle dès le début de son témoignage : « Mais, pourquoi, est-elle restée plusieurs décennies membre, très active, de cette Église dans l’Église ? Une organisation aux méthodes et pratiques sectaires, comme elle clame. »

J’ai, sous les yeux, son très long récit et, alors, à travers les 450 pages de ce qu’elle présente comme une sorte de plaidoyer pour « la Vérité, la Justice et la Liberté », des réponses sont données. Des réponses qui dérangent, secouent, révoltent, parfois.

Je la cite : « Ce que le lecteur apprend reflète ma vie dans l’Opus Dei et révèle en même temps la nature intrinsèque de cette institution, depuis 1948, lorsque je demandais, à Madrid, à être admise comme numéraire jusqu’en 1966, à Rome, quand Mgr Escriva m’obligea à présenter ma démission. Il raconte également les représailles dont j’ai été l’objet de la part de l’Opus Dei pendant de nombreuses années, alors que j’avais cessé d’appartenir à cette institution. » Fin de la première mise au point éditée début 2016.

 

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Maria del Carmen Tapia – photo Opus Dei

À titre informatif, il faut savoir qu’au sein de l’Opus Dei, et selon la description qui en est faite par Maria del Carmen Tapia (photo Opus Dei ci-contre), une personne dite numéraire s’engage à vivre la pauvreté, l’obéissance et la chasteté, ce qui, selon moi, n’est pas répréhensible en soi. C’est un triple engagement que beaucoup d’ecclésiastiques, de moines et monacales pratiquent de leur plein gré.

En revanche, en découvrant la suite du témoignage, je me doute que d’aucuns auront un sentiment de stupeur et de consternation par rapport à un fonctionnement de l’Œuvre de Dieu incompatible avec la démocratie et le respect de l’être humain, qui en est un corollaire.

Au nom de l’Église

 Nouvelle précision de Maria del Carmen Tapia :

« (…) il existe des « corporations » immorales et des « polices secrètes » épouvantables dans ce monde, cela n’est pas nouveau. Ce qui est douloureux, par contre, c’est que cela se fasse au nom de l’Église et par conséquent en trompant l’opinion publique, catholique ou autre », dit-elle.

Elle apporte un premier éclairage édifiant sur ledit fonctionnement sectaire :

« Surtout (au sein de l’organisation), on ne parle jamais des personnes qui ont quitté l’Opus Dei ni de ceux qui se sont suicidés ou qui ont tenté de le faire, ni de ceux qui sont devenus fous. On ne parle pas non plus des prêtres qui ont quitté l’Œuvre : l’Opus Dei les fait tous taire. »

Grave accusation, s’il en est, mais, ensuite, défilent les notions de censure, de lavage de cerveau, d’endoctrinement : « Mes supérieur(e)s firent de moi une fanatique parfaite », avoue-t-elle encore.

Femme intelligente, cultivée, à l’indéniable ouverture d’esprit, comment a-t-elle pu être « piégée » de la sorte, si j’ose dire ?

Il est question d’harponnage de l’Opus Dei savamment étudié et mis en pratique, raconte-t-elle.

Alors qu’elle était fiancée, qu’elle déclarait clairement ne jamais vouloir devenir nonne, et que son futur mari et elle avaient l’intention de vivre en bons chrétiens et d’aider autrui, il lui fut répondu « qu’on peut donner à Dieu ses richesses, sa vie et son fiancé non comme une vocation religieuse mais comme un acte personnel de générosité. Et que ceci n’était pas possible en étant mariée. (…) On insistait sur le fait que je devais déposer ma vie entière entre les mains de Dieu sans rien lui demander en échange, et que c’était là le sacrifice de la vie de chacun pour le bien de l’humanité entière que j’avais voulu « aider », mais de manière différente et limitée ».

En termes assez libres, il apparaît, donc, que le poisson était ferré et qu’il l’est resté deux décennies !

Liberté bannie

 Le fiancé de Maria del Carmen Tapia, lui, semblait avoir compris la stratégie de l’Opus Dei, telle que décrite par l’élue de son cœur : « Si tu me quittais pour un autre homme, je lui casserais la figure. Mais que puis-je faire à un Dieu devant lequel je m’agenouille chaque jour ? »

Effectivement, sa fiancée rompit et s’engagea à fond dans l’Œuvre :

« Alors, moi aussi j’avais recours au mensonge pour aider à tout prix Rome et Mgr Escriva. Je reconnais avoir été moi aussi un bourreau en utilisant l’arme du silence dans l’Opus Dei. »

Bourreau ? Le terme m’est paru excessif. Et pourtant…

Pourtant, la suite du témoignage fait, encore, état de coups de fouet, autrement appelé « discipline », et du cilice, chemise ou large ceinture de crin portée sur la peau en pénitence, et qui furent imposés à Maria del Carmen Tapia par, tenez-vous bien, « générosité ». De plus, elle ne pouvait pas dire à ses proches qu’elle était membre de l’Opus Dei, qu’elle ne pouvait pas avoir de vrais amis ou de confidents, car tout cela était considéré comme fautes graves.

Certes, elle reconnaît que diverses pratiques furent, disons, quelque peu assouplies, n’empêche, elle explique encore qu’il était interdit d’entretenir des relations familiales et, même, de se confesser à un prêtre qui n’appartenait pas à l’Œuvre.

En sorte, elle prouve que le terme « liberté » était banni de son temps passé à l’Opus Dei et, d’après d’autres témoignages, et qu’il resterait encore un lointain concept au sein de cette institution.

Au terme de cette lecture, une constatation restait évidente : comment et pourquoi le pape Jean-Paul II, tant adulé dans la chrétienté, avait-il pu accepter que Mgr Escriva, décrit, je cite, comme un véritable « gourou sectaire, sexiste et machiste » ait pu être canonisé en 2002 ?

Autre constatation sous forme de questionnement : le pape François qui, d’après le monde chrétien et des observateurs neutres, semble vouloir remettre bon ordre au sein de pratiques, disons, négatives, pour ne pas dire délictueuses, pensons à la pédophilie, va-t-il se pencher sur ce dossier éminemment épineux de l’Opus Dei ?

Des réactions

 

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Nonciature apostolique à Bruxelles.

Dans pareil dossier « explosif », il m’est apparu nécessaire, pour ne pas dire indispensable, de susciter des réactions de très hautes personnalités de la chrétienté. À cet effet, de manière écrite (sur le bon principe que les écrits restent et que les paroles s’envolent), je me suis adressé à une dizaine d’entre elles : archevêques et évêques de Belgique et de France, vicaires généraux, délégués épiscopaux et, même, à la représentation de l’Église catholique à la Communauté européenne, et, au sommet du sommet, aux nonces apostoliques, c’est-à-dire aux ambassadeurs du Vatican, à Bruxelles (photos ci-contre) et à Paris.

À chaque personnalité, ma question fut la même et, en somme, résumait ce dont je vous ai déjà entretenu :

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                                                                                                                                           Siège à Bruxelles.

« Dans le cadre d’un reportage pour « Fréquence Terre-RFI », il me serait utile de recevoir une réponse à la question suivante : « Quelle est votre opinion au sujet de l’Opus Dei, organisation parfois cataloguée d’ « Église dans l’Église », dont le fondateur, Mgr Escriva de Balaguer, a été canonisé par le pape Jean-Paul II en 2002, malgré le fait que, selon maints témoignages qui paraissent crédibles, il ait été à la tête de cette Œuvre décrite comme sectaire ? » »Je vous remercie beaucoup pour votre collaboration. »

J’ai reçu deux réponses sur dix. Une du secrétaire du nonce apostolique dans la Capitale de l’Europe, que je vous lis :

 

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                                                                    Réponse de la Nonciature apostolique à Pierre Guelff.

« En réponse à votre question la nonciature apostolique vous propose de consulter le site: www@vatican.va en ajoutant: Prélature de l’Opus Dei. Vous trouverez là les informations que vous cherchez. Avec les salutations respectueuses. » (photo ci-contre)

Bien, je ne vais pas ergoter sur le fait que www@vatican.va n’est pas un site mais une adresse email, et, bien entendu, j’avais consulté le site internet de l’Opus Dei en long et en large, mais c’était l’occasion d’y retourner avec la précision fournie par la nonciature, à savoir « Prélature de l’Opus Dei ».

Qu’y trouve-t-on ? En français, des biographies de Josemaria Escriva de Balaguer, des déclarations à l’occasion de sa future canonisation, puis les programmes au sujet de celle-ci, différents discours aux Rencontres internationales de 2002, 2004, 2005, 2006…, des audiences générales de Benoît XVI, une impressionnante liste de 122 associations internationales de fidèles, avec en 45e place celle des « Coopérateurs de l’Opus Dei ».

Voici le contenu, mot à mot, de ce qu’en dit le Vatican :

« Sont Coopérateurs de l’Opus Dei, les femmes et les hommes qui, sans être des fidèles de la Prélature de l’Opus Dei, constituent une association propre et inséparable de celle-ci. Avec les fidèles de la Prélature, les Coopérateurs collaborent par la prière, le travail et l’aide économique à la réalisation d’activités éducatives, d’assistance, de promotion culturelle et sociale, contribuant au bien commun de la société. Parmi les Coopérateurs de l’Opus Dei figurent aussi des non-catholiques, des non-chrétiens et des non-croyants, qui partagent les objectifs de promotion humaine et sociale auxquels tendent les initiatives apostoliques, ouvertes à tous, que promeuvent les fidèles (laïcs et prêtres) de la Prélature, avec tant d’autres citoyens. Les Coopérateurs bénéficient de la prière de l’Opus Dei. En outre, s’ils le désirent, ils peuvent bénéficier de la formation offerte par la Prélature pour approfondir le message de Jésus et leur vie spirituelle et donner un témoignage personnel — sans former de groupes — cohérent avec la vocation chrétienne. Cette formation invite les Coopérateurs catholiques à recourir à la prière, aux sacrements, à l’intercession de la Vierge, en démontrant par les œuvres leur amour de l’Église, du Successeur de Pierre et des évêques. Un point essentiel de l’esprit de l’Opus Dei, présent dans la formation, est la sanctification du travail professionnel et des devoirs familiaux et sociaux, c’est-à-dire l’identification au Christ dans le quotidien. Les Coopérateurs collaborent aussi personnellement avec d’autres initiatives apostoliques dans leurs diocèses respectifs. »

Les Coopérateurs de l’Opus Dei sont présents, comme l’Œuvre, dans 63 pays ainsi répartis: Afrique (7), Amérique du Nord (11), Amérique du Sud (11), Asie (8), Europe (22), Moyen-Orient (2), Océanie (2).

Suivent l’adresse internet de l’Opus Dei, celle de la curie de la prélature à Rome avec téléphone, fax et email.

 

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Réponse de la Conférence épiscopale belge à l’interpellation de Pierre Guelff.

La deuxième réponse (photo ci-contre) que j’ai reçue a le grand mérite d’être personnalisée par rapport à ma demande. Elle émane du Père Tommy Scholtes, de la Compagnie de Jésus, donc jésuite, l’attaché de presse et porte-parole de la Conférence épiscopale de Belgique, c’est-à-dire l’archevêque, sept évêques et trois vicaires généraux.

Je vous livre également cette réaction :

« L’Opus Dei est effectivement une Prélature personnelle de l’Église catholique. Elle est donc clairement dans l’Église. Sa spiritualité basée principalement sur les Évangiles et les Écrits du fondateur canonisé par le pape Jean-Paul II vise la sanctification des fidèles par une vie religieuse profonde et rigoureuse.

Cependant, si même des personnes sont parfois contactées par l’Opus Dei, personne n’a une quelconque obligation morale d’y entrer ou d’en sortir. Il en va de même pour toute association de fidèles reconnue par l’Église.

Même si des questions ont été posées ci et là sur l’Opus Dei, questions fondées sur des expériences personnelles malheureuses, l’Opus Dei ne peut être considérée comme « sectaire », et cela ne met pas non plus en cause la canonisation faite par le pape.

Mais il est sûr que tout le monde ne se sentira pas nécessairement à l’aise avec l’Opus Dei. C’est la diversité de l’Église où certains aimeront d’avantage tel type de spiritualité que telle autre. Mais c’est toujours la liberté des personnes qui doit primer. »

Un non-événement éditorial ?

 

sj_rest_fr.pngSite Saint Josémaria Escriva.

 Il est évident, que je ne pouvais pas m’arrêter à ces derniers propos et j’ai constaté qu’il existait un site internet entièrement dévolu à « Saint Josémaria Escriva, fondateur de l’Opus Dei » (photo ci-contre). J’y ai lu plusieurs questions « délicates » – et leurs réponses, que je ne m’autorise pas à commenter, n’étant pas historien – ayant trait au passé du canonisé : son attitude face à la Seconde République, celle à l’égard de Franco durant la guerre et le Coup d’État du 18 juillet, les raisons de se cacher , les suites de dénonciations à un « Tribunal du Communisme et de la Franc-Maçonnerie », ses virulents propos au sujet d’Hitler…, et puis, de nombreux témoignages de fidèles : « Il m’a appris à travailler avec amour », « Sa vertu préférée ? La sincérité. », etc.

 

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Sigle de l’Opus Dei.

En revanche, ce qui m’a paru essentiel dans le présent reportage, c’est la réaction officielle de l’Opus Dei-même (sigle ci-contre) par rapport à l’ouvrage de Maria del Carmen Tapia.

Son titre est sans la moindre ambiguïté : « Au cœur de l’Opus Dei » : réédition d’un ancien témoignage amplement démenti »

À savoir :

« Un quart de siècle après sa parution en Espagne, Albin Michel choisit d’éditer en français le livre-témoignage de Carmen Tapia sous le titre « Au cœur de l’Opus Dei ». Présenté comme « un témoignage accablant » et inédit, cette traduction s’apparente davantage à un non-événement éditorial.

Publié pour la première fois en 1992, ce témoignage affichait une ambition claire : s’opposer à la béatification imminente du fondateur de l’Opus Dei. 25 ans après sa sortie de l’institution, Carmen Tapia y relatait ses souvenirs de 18 années passées en son sein, dans les années 50-60.

Les contre-vérités et distorsions de la réalité qui émaillent l’ouvrage ont été largement et formellement démenties par nombre de témoins oculaires. Le Saint-Siège a lui-même procédé à une enquête approfondie à l’occasion de la béatification (1992) puis de la canonisation (2002) de Josémaria Escriva.

En 2001, l’auteure elle-même, apprenant la prochaine canonisation de Mgr Escriva, revenait sur ses propos. Elle exprimait sa joie et sa conviction de la sainteté du fondateur, précisant même avoir été exaucée à de nombreuses reprises après l’avoir prié (déclaration à l’agence ANSA, 23/12/2001).

Pour Béatrice de la Coste, porte-parole de l’Opus Dei en France, « la publication, aujourd’hui, de cet ouvrage, laisse perplexe. Les raisons d’une polémique n’existent plus ; Carmen Tapa a de plus déclaré que ce serait une « grave erreur » d’utiliser ses propos contre saint Josémaria.

 

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Communiqué officiel de l’Opus Dei concernant le livre « Au cœur de l’Opus Dei » de Maria del Carmen Tapia.

La prélature de l’Opus Dei travaille en pleine harmonie avec les évêques et le Saint-Père au service de l’Église. Elle compte actuellement plus de 90 000 membres dans le monde. Comme le précise Béatrice de La Coste « L’idéal de vie proposé dans l’Opus Dei ne peut être bien vécu que dans une grande liberté intérieure. Les quelques personnes qui désirent quitter l’institution le font avec la même liberté qu’elles ont eue pour y entrer et y vivre. » (Photo ci-contre)

Conclusion

DSC02183.JPGOpus deift300.jpg Façade de l’immeuble de l’association satellite de l’Opus Dei à Paris et son graffiti « énigmatique ».

 En regardant de plus près une photo que j’avais prise de l’immeuble de l’Association parisienne satellite de l’Opus Dei, je constate qu’un graffiti en trois mots avait été inscrit, en rouge et en grandes majuscules, sur la façade : « Consumer ! Pauvre Consommez ! »

Assurément, un message énigmatique qui l’est tout autant que l’Œuvre de Dieu. C’est une évidence à la lumière de tout ce qui entoure le témoignage de Maria del Carmen Tapia, me semble-t-il.

 

 

 

Les Enfants de Salomon (2/5) : Une « concurrence » pour l’Église (Éditions Dervy)

PGFFT et ED.jpg« Littérature sans Frontières » est une chronique de Pierre Guelff sur « Fréquence Terre-RFI ».

 L’imposant ouvrage d’un millier de pages et de centaines de références  « Les Enfants de Salomon » d’Hugues Berton et de Christelle Imbert publié aux Éditions Dervy, méritait, selon moi, plusieurs chroniques. La présente est la deuxième et conforte le lecteur dans ce que le Compagnonnage est bien un « réseau de transmission des savoirs et des identités par le métier », véritable école de savoir-faire et de savoir être visant, aussi, ce qui est un aspect majeur, le perfectionnement moral et spirituel de ses membres.

DSC01834bis.jpgMystère, ésotérisme, spiritualité peuvent également lui être associés et il y a lieu de spécifier que la Franc-Maçonnerie Opérative, sans en être son héritière, repose sur des concepts, symboles et rituels ayant pour but le perfectionnement de l’être et de l’humanité. Disons que Compagnonnage et Franc-Maçonnerie Opérative sont de lointains cousins.

Mais, dans cette chronique-ci, il est quand même bon de rappeler que le terme « franc » est attaché à la pierre travaillée et « maçon » à celui qui la travaille. Il est encore question de groupements ou guildes, certains itinérants au fil du temps.

Alors, églises, cathédrales, châteaux, ponts… furent érigés par ces Bâtisseurs exceptionnels avec l’aide précieuse de confréries et communautés de métiers, certains ayant des femmes pour membres ce qui, on s’en doute, n’agréa pas toujours différents pouvoirs, dont l’Église qui jeta un regard plus que suspicieux ! D’où, parfois, une certaine « clandestinité » pour perpétuer et développer ces associations et leurs symboliques destinées, entre autres, « à la transformation intérieure de l’être », ce qui dérangea Rome y voyant une concurrence !

Salomon2A.JPGMais, des magistrats, des seigneurs, des rois… acceptèrent le principe de communautés de métiers qui s’organisèrent en rédigeant des statuts émettant diverses règles : celle de prêter serment de garder loyalement le métier, de ne pas dévoiler les secrets du métier, de se porter mutuellement assistance, d’établir une période d’apprentissage pour les apprentis, les compagnons et les maîtres, d’établir l’art du Trait, les marques – que l’on retrouve encore sur des poutres ou piliers d’édifices anciens -, le fonctionnement de loges (lieux de réunion, de formation, de stockage des matériaux…), de proposer une symbolique omniprésente à tous les degrés, des dispositions confraternelles entre sœurs et frères affilés à une même guilde, etc.

Que j’évoque des symboles, à la page 77 de ce livre, on peut voir un compas (représentation de l’esprit) recouvrant une équerre (représentation de la matière) photographiés dans la Chapelle des Âmes du Purgatoire de Roquebrune-sur-Argens. En d’autres termes, cela signifie qu’il s’agit du grade d’un Maître, celui dont l’esprit maîtrise la matière.